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La baisse des émissions de soufre a une influence marginale sur le réchauffement climatique

La simple évolution d’une norme dans le transport maritime a-t-elle pu influencer la trajectoire du réchauffement climatique ? Après les multiples records de l’année 2023, la plus chaude enregistrée dans l’histoire humaine, des chercheurs, des observateurs, mais aussi des défenseurs de la géo-ingénierie, notamment au moyen du dioxyde de soufre (SO₂), s’étaient demandé si la baisse du taux de soufre dans les carburants des navires de transport, imposée depuis 2020, avait amplifié le réchauffement constaté cette année-là.
Publiée le 14 août dans la revue Earth’s Future, une étude relativise grandement l’influence du SO₂ dégagé par la combustion des navires. « Nos simulations de modèles montrent que l’IMO 2020 [les nouvelles normes mises en place par l’Organisation maritime internationale] contribue à expliquer le réchauffement exceptionnel de 2023, mais d’autres facteurs sont nécessaires pour en tenir pleinement compte », résument les auteurs, tout en admettant l’aspect très épineux de cet objet de recherche : « L’ampleur de cet effet fait l’objet de débats houleux. »
Pour éclaircir cette question, les chercheurs ont fait tourner des modèles climatiques en y intégrant cette nouvelle norme qui oblige les navires à utiliser des carburants avec une teneur en soufre limitée à 0,5 %, alors que le taux autorisé jusque-là était de 3,5 %. Une mesure prise pour protéger les populations des effets nocifs des aérosols, « notamment en Inde, dans l’est de la Chine et dans les zones côtières de l’Afrique et du Moyen-Orient », selon le sixième rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Sauf que cette diminution du dioxyde de soufre dans la troposphère (l’espace compris entre la surface terrestre et une altitude d’une dizaine de kilomètres), bénéfique pour la santé humaine, contribue à diminuer la taille des gouttelettes en suspension dans les nuages et donc leur albédo, c’est-à-dire leur capacité de réflexion de l’énergie solaire. Selon l’étude, cela aura pour conséquence une augmentation de la température annuelle moyenne de la surface de la planète de 0,046 °C sur la période 2020-2029.
Une augmentation à ne pas négliger, mais infime par rapport aux trajectoires de réchauffement global, principalement dû aux émissions de gaz à effet de serre. Selon les différents modèles de l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique cités par le GIEC, la période 1980-2020 a connu une augmentation de température de 0,75 °C à 1,19 °C. En 2023, la température mondiale annuelle a été supérieure de 1,45 °C à celle des niveaux préindustriels, selon l’Organisation météorologique mondiale. Elle a même été 0,60 °C plus élevée que la moyenne de la période 1991-2020. « Cette étude est intéressante, car elle vient confirmer le niveau des effets attendus qui ne peuvent pas expliquer les trajectoires record de 2023, essentiellement pilotées par le réchauffement climatique lié aux émissions de gaz à effet de serre et par la variabilité naturelle du climat avec El Niño, affirme Christophe Cassou, directeur de recherche (CNRS) à l’Ecole normale supérieure. D’ailleurs, quand on compare les cartes de réchauffement induit par la diminution de soufre, que l’on obtient à partir des modèles, avec les cartes de températures observées en 2023, elles ne correspondent pas du tout. »
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